La Rumeur

La Rumeur

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Il y a des rumeurs rebelles qui n'aiment pas faire parler d'elles à tous les coins de rimes, de rues, de disquaires et d'antennes radio. Prenez le groupe « La Rumeur » par exemple : eux, le marketing forcené, la promo à tout va, les chaînes en or plaqué qui brillent et tout le toutim, ce n'est pas vraiment leur truc. En effet, c'est dans l'ombre que « La Rumeur » a démarré, à coup de concerts enflammés, de textes bien aiguisés et d'engagement spontané. Et puis progressivement, « La Rumeur » s'est fait un nom sans trop le chercher, dans le milieu fermé du hip hop souterrain.

En l'espace de trois ans, Philippe, Ekoué, Mourad et Hamé se sont brillamment imposés avec une trilogie corrosive sous forme d'EPs bruts de coffre : « Le Poisson d'avril » (1997), « Le franc-tireur » (1998) et « Le Bavar et Le Paria » (1999).

Mais quand on a du talent à revendre, on ne peut pas rester anonyme bien longtemps dans le milieu musical, surtout lorsque l'on assure sur des compilations de rap et que l'on participe aux albums de grosses pointures du hip-hop comme Assassin.
De plus, il est rare que les grandes maisons de disques restent sourdes aux rumeurs enthousiastes qui annoncent l'existence d'un nouveau groupe sans concession regorgeant de pépites sonores. Le label EMI propose ainsi à La Rumeur de signer un contrat chez eux, et après moult tergiversations, accepte, pensant qu'il est possible d'être à la fois édité chez une major et de garder son indépendance artistique. Et La Rumeur a bien fait d'accepter puisque les albums publiés chez EMI gardent la même fraîcheur, la même spontanéité, la même verve fougueuse des opus précédents.

En 2002, le groupe arrive jusqu'aux oreilles du grand public avec l'album « L'Ombre sur la mesure » qui fait un carton. Deux ans après, ils sont à nouveau de sortie avec un deuxième opus, « Regain de tension » qui aborde notamment les moments sombres de la vie du quatuor, accusé de « diffamation à l'égard de la police nationale » après que Hamé ait publié dans le fanzine gratuit « La Rumeur » un texte engagé, « Insécurité sous la plume d'un barbare », dont le passage suivant a provoqué l'indignation :

« Les rapports du ministère de l'intérieur ne feront jamais état des centaines de nos frères abattus par les forces de police sans qu'aucun des assassins n'ait été inquiétés ».

Ce même magazine, sorti au moment de la promo de l'album « L'Ombre sur la mesure », a suscité aussi la réaction de la radio Skyrock qui a porté plainte pour « incitation à la haine et à la violence » concernant le texte « Ne sortez plus sans votre gilet pare-balles », mais leur dépôt de plainte n'aboutira pas. En revanche « La Rumeur » sera attaqué en justice par le Ministère de l'Intérieur. Hamé sera finalement relaxé, mais suite à cet épisode judiciaire, La Rumeur quitte EMI qui ne s'occupe désormais que de la distribution de leurs albums. La production et l'édition étant gérées par le propre label du groupe, « La Rumeur Records ».
« La Rumeur » n'en a pas fini avec la justice puisque le Ministère de l'Intérieur a fait appel de la décision du procès de 2004 qui avait donné raison aux rappeurs.